Les Gaulois ne cultivaient pas la vigne et utilisaient comme boisson, diverses qualités de bières fabriquées avec toutes sortes de céréales. Cependant, ils connurent le vin avant la conquête de Jules César, dès que la voie navigable par le Rhône fut ouverte.
Le vin, article de luxe, était vendu fort cher : une amphore de 26 litres était échangée couramment contre un esclave.
Les vins importés venaient d’Italie ou de Grèce, mais très rapidement la culture de la vigne progressa le long des voies commerciales. C’est à Vienne sur les bords du Rhône que se situent, dès les premiers siècles de notre ère, les témoignages de la progression du vignoble gallo-romain.
Le vin circulait en amphores sur les fleuves et le parcours terrestre d’une vallée à l’autre se faisait en outres de peaux, un cheval pouvant porter 2 outres. A partir du début du second siècle apparut le tonneau, invention gauloise.
L’empereur Probus (276-282) autorisa toutes les cités de la Gaule à cultiver la vigne. La vigne n’était pas seulement une entreprise commerciale, mais faisait l’objet d’un respect quasi religieux. L’évêque (ainsi que les abbayes) était le premier viticulteur de la cité. Le vin était indispensable, non seulement au culte, mais pour assurer l’hospitalité des personnages de passage. Seul l’évêque pouvait réunir les capitaux nécessaires à la plantation et à l’entretien du vignoble. Ne pas servir du vin à un hôte était considéré comme un déshonneur.
On peut attribuer aux moines la création du vignoble de la vallée de la Laigne. Leurs relations avec l’abbaye de Citeaux fondée elle aussi par saint Robert en 1098, propagèrent le pinot noir par excellence de la Bourgogne.
Pour remédier au manque de main d’œuvre, il exista, dès l’époque carolingienne, une forme de contrat dit de complant. Un cultivateur recevait d’un propriétaire une terre inculte, s’engageant à y planter des ceps. Au bout de 5 ans, temps nécessaire à la création d’un vignoble, la vigne était divisée en 2 parts égales, l’une revenait au propriétaire et l’autre au cultivateur.
Au moyen âge, les vins se conservaient peu et devaient être bus dans l’année. Les vins des Riceys, rouges, rosés et gris, acquirent une certaine réputation.
Louis XIV les appréciait, et le commerce en était important vers Paris, le Nord de la France et la Belgique.
Les livraisons se faisaient souvent par voie d’eau à partir de Tanley ou de Tonnerre. Les vignerons étaient concurrencés par les vins de Bordeaux venus par mer, après parfois un long voyage (vins retour des îles). Cette particularité fit que les périodes de grande prospérité du vignoble des Riceys coïncidaient avec la fermeture de la voie de mer, en général par suite de nos différends avec les Anglais, période de la guerre de religion qui permit au XVI° siècle la construction des magnifiques églises, Révolution et Empire, qui enrichirent de nombreuses familles de vignerons et leur permirent d’accéder à la bourgeoisie.
L’un des marchands de vin des Riceys (les frères Houet qui, en 1801 acquirent le château de Riceys-Bas) suivait les armées du nord où étaient comme volontaires de nombreux Ricetons, il retrouvait une clientèle qui n’ayant plus de vin, ne regardait pas trop au prix !
Un autre, Claude Gallimard, conclut des contrats avantageux avec des cabaretiers hors de l’enceinte de Paris : les « Guinguettes ».
En 1675, d’après le curé Pierre Regley, il y avait aux Riceys plus de 1.000 feux (environ 3.500 habitants). Le finage comprenait 25.000 ouvrées de vigne (1.400 hectares) pour une production de 3.000 muids (environ 6.600 hectolitres).
Au cours du XVIII° siècle, il y eut une grande misère aux Riceys par suite de mauvaises récoltes, notamment entre 1765 et 1772, période où il n’y eut que 2 années de bon rendement. Une période fut aussi particulièrement critique, celle de 1810 à 1816, qui fut pour presque toute la France une période de famine. Aux Riceys, 400 familles vivaient d’aumône.
Les vignobles des Riceys sont très sujets à la gelée. A l’avènement de Louis Philippe, le vignoble des Riceys était en pleine prospérité. En 1835, il y avait 1.512 hectares de vignes cultivés par 430 vignerons, 334 ouvriers agricoles et seulement 8 laboureurs.
La voie de terre était pratiquement inutilisable pour le transport des vins, étant donné l’entretien médiocre jusqu’à la création du réseau de routes nationales au XVIII° siècle. Par suite des cahots, les tonneaux se décerclaient, chaque convoi devait être accompagné d’un tonnelier et, malgré cela, la perte dépassait souvent 10 %. La construction des chemins de fer ruina complètement le vignoble en permettant l’arrivée à bas prix des vins de Bordeaux et du Midi dans la clientèle normale des Riceys. De nombreuses vignes furent abandonnées, surtout parmi les gros propriétaires, la récolte payant à peine la main d’œuvre. Les marchands de vin disparurent et de nombreux vignerons émigrèrent.
Aujourd’hui, le vin Rosé des Riceys n’a qu’un défaut, sa rareté : issu d’une vendange traditionnelle, le vin n’est élaboré qu’en année ensoleillée.
C’est une production champenoise unique et prestigieuse. Le vignoble de « l’appellation d’origine contrôlée » est situé sur la seule commune des Riceys.
Sur les 866 hectares bénéficiant de l’Appellation Champagne, Coteau Champenois, seulement 350 sont classés en Appellation A.O.C. Rosé des Riceys.
L’appellation Rosé des Riceys date de 1947. Il est obligatoirement millésimé. Il peut se garder de 3 à 10 ans.
Jacques Schweitzer