Le château de Rosières existait déjà en 1201, avec très peu d’habitations autour.
En 1860, voici la description qui en est faite : << A une courte distance de Saint-Julien, et à l’extrémité d’une avenue plantée qui aboutit à la route de Croncels, on trouve le château de « Rozières ». C’est le rendez-vous de la ville de Troyes, le jour de la fête patronale de sainte Madeleine. « Rozières » n’a pas seulement les plus belles pelouses, les allées les mieux sablées, et le parc de plus habilement planté de tous les châteaux du voisinage, il a encore un parterre digne de son nom, de beaux canaux encadrés de gazon, et au-dessus desquels le peuplier, le saule, le noisetier, le sycomore, rempart impénétrable aux rayons du soleil, secouent leurs têtes feuillues. Ajoutez des percées habilement ménagées sous les dômes de feuillage, des salles de verdure, des sentiers qui fuient et se jouent dans les réseaux des taillis, une allée d’ypréaux presque séculaires dont les cimes gigantesques font l’étonnement des curieux, et vous aurez le côté champêtre de la résidence. Pas de journal, pas de chronique d’été qui n’ait dit sous une forme ou une autre, ce que nous disons ici >>.
Charles Fichot, peintre, architecte et lithographe, qui s'est taillé en son temps une grande réputation locale et nationale, décrit au XIX° siècle le Château de Rosières : «… La porte d’entrée a conservé une partie de son ancienne défense militaire. Protégée par des fossés remplis d’eau, elle était appuyée de chaque côté par de fortes murailles et fermée par un pont-levis et des vantaux. Cette défense possédait aussi une citerne latérale avec petit pont-levis particulier, suivant l’usage admis au XIV° siècle. Elle conserve encore les rainures du grand pont-levis et l’unique rainure du pont-levis de la poterne. La façade de la tour d’entrée était défendue par des mâchicoulis qui devaient être crénelés avant la construction de sa toiture moderne. Ces mâchicoulis se composent de fortes consoles de pierres sur lesquelles reposait une plate-bande, aujourd’hui corniche. A droite de la porte est une plus ancienne construction, probablement le corps de garde. Les murs d’enceinte s’y rattachant ont été détruits pour dégager la vue et laisser voir la maison seigneuriale. A gauche sont les communs longeant le fossé. Ils s’appuient par de lourds contreforts et sont limités par une petite tourelle avec meurtrières ». Le beau parc fut, dit-on, dressé par Le Nôtre. En tout cas, il appartient à l’Ecole qui a discipliné la végétation des jardins de Versailles.
Il ne faut pas conclure de Rosières à Roses, car ce serait donner une entorse à l’étymologie. Rosières n’a pas une origine si fleurie. Son nom vient uniquement des roseaux qui hérissaient le territoire avant le défrichement des marais de Saint-Germain et de Viélaines. « A force d’industrie, l’homme a triomphé des conditions paludéennes de la contrée. Les rigoles ont eu raison des flaques d’eau, le roseau a disparu ou tout au moins, s’est exilé, et sur ce sol fertilisé se sont élevés le parc et les jardins qui sont l’honneur de la résidence. Le restaurateur du jardin français de Rosières est M. Arson, ancien maître de forges, qui a soustrait le domaine aux risques d’un morcellement qui eut achevé de compléter les dommages causés par l’industrie un moment en possession du château ».
Autrefois, le château était ceint de murailles crénelées et pourvu de tout l’attirail militaire des places fortes. La seigneurie était tenue noblement en franc-alleu, avec des droits afférents aux trois justices féodales.
Dès le milieu du XVI° siècle, il y avait au château une chapelle où l’on disait la messe. Le château ou maison d’habitation se compose d’un pavillon attenant au corps de logis principal, surmonté de lucarnes à doubles portiques et couronnées du croissant de Diane de Poitiers (dont le buste est encadré dans un médaillon sur une des faces du pavillon). Ce corps de logis inachevé est suivi d’un rez-de-chaussée, suivi d’une galerie sur le devant, communiquant avec une construction en bois à doubles pignons en ogives. En retour est un grand bâtiment construit sous Louis XV. Il s’ouvre au rez-de-chaussée par 4 arcades et 3 portes, et au premier étage, par 7 fenêtres. Au centre de la façade de ce bâtiment est un portique avec pilastres portant un fronton triangulaire orné de 2 blasons accolés et surmontés d’une couronne de comte. Dans la cour se trouve un corps de bâtiment où logeait le fermier, avec pressoir et vinée. Ensuite, un bâtiment appelé le Château Neuf. Au bas de ce bâtiment : une chambre à four, laiterie et vestibule, en haut 3 chambres à feu et 2 cabinets. A côté de ce bâtiment : 1 écurie, 3 remises de carrosse et une petite vinée, couverte en ardoise. Ensuite, un vieux bâtiment en bois composé d’une cuisine avec office, lavoir, chambre basse, cabinet, salle à manger. Au dessus : appartement de 5 chambres et un cabinet, couvert en ardoise. Un autre corps de bâtiment, fait face à la grande porte.
Le beau parc, de 23 hectares fut, dit-on, dressé par Le Nôtre. En tout cas, il appartient à l’Ecole qui a discipliné la végétation des jardins de Versailles. Il comprend notamment un rond-point d’où partent de larges allées, de très beaux tilleuls font une voûte de feuillage et ont valu le titre de « salon de verdure ».
Parmi les anciens propriétaires figurent : en 1242 Guillaume 1er de Rosières qui était vassal du comte de Troyes, de 1249 et à 1252 son fils Thibaud III, avec pour coseigneurs ses frères, Guillaume II et Thomas de Rosières. Les actes d’Henri III (qui succéda à son frère Thibault V) sont peu nombreux. Il y a entre autres une donation, datée de Saint-Jean-Pied-de-Port, du 13 décembre 1273, faite en faveur de Guyot de Quatre Sols de Rosières et de ses successeurs, qui tiendront la maison de Rosières, de droits d’usage dans les forêts d’Isle et de Chaource. En 1448 Pierre de Verdun, clerc, vivant à Troyes, en 1478 Pierre Le Pelé, puis sa sœur Guillemette Le Pelé, épouse de Jean de Vittel, en 1547 leur fille Antoinette de Vittel mariée en 1516 à Pierre de Provins. Les titres de propriété indiquent que la terre de Rosières, de franc- alleu noble (héritage libre de tous devoirs féodaux), a été acquise par Pierre de Provins, maire de Troyes de 1538 à 1542, de Robert de Chantaloé, écuyer, sieur de Baires et de Laines-Bourreuses, et de Katherine d’Origny, sa femme. Un fragment de la tombe, en marbre noir et avec armoiries de ces 2 époux, est déposé au Musée de Troyes, depuis 1806. En septembre 1521, François 1er est en visite à Troyes. Il accorde à Pierre de Provins, écuyer, sieur de Viâpres-le-Petit, de Rosières et de Laine-Boureuses, la permission d’établir, « en chacune de ces 2 seigneuries, où il y a grosse motte, close et environnée de grands fossés à eau vive avec bondes » et après avoir pris l’avis du conseil de ville, des ponts levis avec chaînes de fer à l’entrée et à l’issue desdites mottes, le roi se réservant le droit de les faire démolir, s’il y a préjudice pour lui et la chose publique. En 1542, Odard Hennequin, évêque de Troyes, et Noël Coiffart, lieutenant-général au bailliage, furent, en qualité de commissaires royaux, chargés de vendre les droits de jurés levés pour le roi dans la ville et la prévôté de Troyes. Christophe Ménisson, écuyer, sieur de St-Aventin, se rendit acquéreur de cette partie du domaine royal. Cette première aliénation qui comprenait les droits levés sur Rosières, opéra un démembrement considérable de la prévôté de Troyes. Les sieurs de Rosières sont ensuite en 1547, Adrien de Pétremol, trésorier extraordinaire des guerres, Pierre Guichon trésorier-général des fortifications de France, son frère Antoine, président de la chambre des comptes à Châlons, qui vend la seigneurie à Charlotte Hennequin et à sa sœur Geneviève, qui vend ses terres en 1615 à Vincent Le Marguenat, époux de Nicole de la Ferté. Le 15 août 1615, le prince de Condé envoie à Troyes, avec lettre de créance, un sieur Gombault, ancien officier de l’Hôtel de des Monnaies de Troyes, alors seigneur de Rosières, capitaine de 100 hommes d’armes au service du roi, mais servant le prince. Arrêté aux portes de la ville avec un archer, il est conduit aux maire, échevins et officiers de justice. Cette arrestation cause de l’émoi parmi la population, car l’armée du prince est dans le voisinage. De suite, M. de Lenoncourt, qui est à Lusigny avec 2 compagnies, est invité à jeter sans délai ses troupes dans les faubourgs. La lettre, apportée par le sieur Gombault, seigneur de Rosières, donnait l’assurance de l’attachement du prince envers le roi. La prise d’armes n’avait pour but que son service, et seulement contre les ennemis et les perturbateurs de l’Etat. Le prince avait su que les Troyens se préparaient à lui faire la guerre. Il demandait que le commerce continuât avec les gens de son parti et « qu’ils demeurassent neutres ». Le conseil de ville éluda la réponse et, de fait, il se déclara pour le roi. En 1656, le nouveau propriétaire est Samuel Guichon receveur général des rentes de la ville de Paris. Le domaine resta au sein de la famille Guichon jusqu’en 1733, date à laquelle Anne Guichon, dernière héritière de Samuel, céda l’ensemble des terres que constituaient Rosières, Laines-Bourreuses et Viélaines, à Pierre de Puget, seigneur de la Marche, grand bailli de Troyes, qui la vend à son tour à Claude Raphaël Dufour en 1749, marchand à Troyes, puis officier chez le roi. En 1766, Louis-Nicolas Berthelin est le nouveau propriétaire, qui en fait don à son neveu et filleul, mais avec réserve d’usufruit. A la révolution française, le Château est déclaré bien national et revendu en tant que tel. Ensuite, de nombreux propriétaires se succèdent : Jean Edme Berthelin de Viélaines en 1800, Louis Bénigne Dussonay de Mély en 1812, les filateurs Roblot et Chaumet en 1818, Jean Baptiste Arson en 1822. En 1923, le commandant de cavalerie Louis Joseph Reynard-Lespinasse, membre résidant de la société académique de l’Aube, achète le château. Sa veuve le revendra en 1933 à M. Pomez Jolly, le dernier acquéreur.
Lorsque Charles Perrault était propriétaire du château de Rosières, se succédèrent au château diverses personnalités bien connues comme, Boileau, Voiture, Claude Perrault (neveu de M. Guichon), son frère, l’architecte de la colonnade du Louvre et des plans de l’Observatoire de Paris et le fils de Jean de La Fontaine, qui y demeura et y travailla par la suite. Le lieu était réputé pour ses distractions et son calme, si bien que Charles Perrault ne put s’empêcher d’écrire une épître sur la chasse à Rosières.
En 1919, Rosières devient « Rosières près Troyes ».