Relevé au Journal de l'Aube... Jeudi 14 et vendredi 15 Mai 1 846

 

Vendeuvre :

« Le 3 mai, deux habitants de cette commune entrèrent dans un cabaret. Après y avoir pris quelque nourriture et bu passablement, ils se firent servir plusieurs bouteilles, puis l'un fit à l'autre la gageure qu'il n'avalerait pas coup sur coup 7 autres verres de vin.

L'individu à qui cette proposition était faite, ayant déjà fait des gageures de ce genre, accepta sans hésiter et le pari fut le coût de 3 litres de vin.

Le liquide est bientôt apporté, et les verres presque au même moment vidés.

Notre homme parvient bien à boire 6 verres tout à fait remplis ; quant au septième, malgré ses efforts, il en laissa la moitié.

─ Tu as perdu alors, lui dit l' autre, puisque tu n'as pas tout bu.

─ Non, je n'ai pas perdu. Et je ne paierai pas le pari.

On s'échauffe de part et d'autre, on échange des paroles désobligeantes, puis ils se repoussent l'un l'autre et finissent par se frapper, si bien que celui qui faisait refus de payer le montant de la gageure est lancé de force contre une table, il en est relevé tout contusionné ayant plusieurs côtes enfoncées. »

 

Cet article pose quatre questions :

─ La première, c'est que le Journal de l'Aube n'avait pas grand-chose à raconter.

─ La seconde, c'est que l'histoire est du réchauffé, vu que le journaliste relate un fait, qui s'est déroulé le 3 mai et que sa publication n'a lieu que les 14,15 mai.

─ La troisième, c'est que les Vendeuvrois sont joueurs.

─ La quatrième, c'est qu'ils aiment lever le coude.

 

Que n'aurait-il pas écrit s'il avait eu vent de l'histoire que je vais brièvement vous conter :

 

Ça s'est passé aux Voies de Vienne, dans les années cinquante : 

Alors qu' il jouait aux cartes chez lui, avec des amis, et après avoir bu quelques canons, X* qui n'en finissait pas de perdre, se sentit fort dépourvu lorsqu'il s'aperçut qu'il n'avait plus un liard.

─ Sacré tonnerre, s'est-il écrié (mais en plus vulgaire). Je n'ai plus un maravédis (toujours en plus vulgaire), je suis complètement à sec. Qu'est-ce que je pourrais donc bien miser ?

Comme sa chère et tendre vint à passer par là, en désespoir de cause, il dit quelque chose comme : « Je joue ma femme. »

La belle, qui n'avait pas non plus la tête à sucer des glaçons, se contenta de rire...

Et partenaires tout réjouis, d'accepter d'emblée.

 

Hélas ! L'histoire s'arrête là. Car elle ne dit pas si X perdit ou gagna !

 

Toutefois, quelques semaines plus tard, en voyant cette dernière sur le pas de sa porte, j'en conclus que le bougre n'avait pas perdu ! La dame le regretta-t-elle ? On ne le saura jamais.

 C.M

 

 

* Par respect pour la descendance